mardi 8 octobre 2013

Retour vers le futur sans couche !

Connaissez-vous l'hygiène naturelle infantile ou «elimination-communication»? Derrière ces mots se cache une notion plus simple: sans couches, les enfants deviennent propres plus vite. Même si cela veut dire ramasser un peu de pipi et de caca.


A Pékin, il est encore courant de voir des enfants qui font pipi et caca en pleine rue, une pratique facilitée par des pantalons troués aux fesses, les kaidangku. Avec cet accoutrement, le petit fait ses besoins sans salir ses vêtements et sans porter de couche.

 Harald Groven via Flickr CC
Alors que la classe moyenne chinoise se convertit progressivement aux Pampers (la Chine est le deuxième marché de la marque), un nombre croissant de parents occidentaux font le chemin inverse et adoptent les techniques dites d’elimination-communication (ou hygiène naturelle infantile, HNI).

Les pantalons fendus à la chinoise sont désormais disponibles en France via EcoPitchoun, une boutique en ligne qui vend des accessoires spécialisés, du petit pot pour nourrisson aux langes imperméables.

Depuis 2004, l’organisation américaine DiaperFreeBaby aide des milliers de familles à se passer de couches. Une centaine de villes américaines ont des formateurs agréés, et l’association est rapidement devenue internationale, avec des réseaux actifs au Canada, en Australie et en Europe.

Pendant les premiers mois, les parents doivent apprendre à reconnaître les signaux indiquant que leur enfant a envie de faire pipi ou caca (on peut aussi commencer après un an). Il faut ensuite se dépêcher de positionner bébé au-dessus du lavabo ou des WC. Beaucoup de parents ont toujours un petit pot à portée de main.

Lisa Baker, une porte-parole de DiaperFreeBaby à Atlanta, admet que certains enfants ne préviennent pas clairement. Dans ce cas, on peut faire des projections rationnelles: au réveil, bébé fait pipi, après avoir mangé, bébé fait caca, donc je le mets sur le pot à ce moment, et je fais des petits sons «psss» pour le pipi, et «hum hum» pour le caca, afin de l’encourager.
Les adeptes de la méthode y voient en effet un enrichissement de la relation parent-enfant.

Le fils d’Ulrika Casselbrant, une jeune mère à Stockholm, communiquait ses envies de pipi par un petit cri court et un regard soutenu. A partir de 11 mois, il avait appris un signe spécial pour dire pipi, et il se tortillait avant de faire caca. Pour les parents, attraper les pipis et cacas devient un jeu quotidien.

L’année dernière, des sites spécialisés ont vu le jour en Allemagne et en Suède, et plusieurs livres français ont été publiés dans les quatre dernières années (notamment La vie sans couche et Conseils et astuces pour élever son enfant sans couches ou presque).

Selon Mark Wolraich, le pédiatre qui a rédigé le manuel américain sur l’apprentissage de la propreté, commencer l’elimination-communication très tôt n’est pas problématique tant que l’enfant n’est pas puni ou stressé par les parents. Il recommande plutôt d’attendre après 18 mois, quand le petit peut contrôler sa vessie et son sphincter, mais il n’est pas contre-indiqué selon lui de commencer avant.

Se passer de couches ne traumatisera pas bébé, mais risque de sérieusement compliquer la vie des parents. Sur un groupe Facebook spécialisé, des mères partagent leurs découragements («il signalait bien ses besoins, et là depuis 15 jours, plus rien») et crises de nerf («Comment trouvez-vous le temps de faire cette méthode?... Vous regardez toute la journée votre gosse en attendant qu'il fronce les sourcils?»)

Concilier la vie en appartement avec une pratique issue des villages d’Afrique et d’Asie n’est pas toujours simple. Certains parsèment leurs salons de petits pots, d’autres, comme Lisa Baker, considèrent qu’un peu d’urine par terre n’est pas dramatique («Essuyer le pipi sur le parquet est plus rapide que changer une couche.») Chez Ecopitchoun, on recommande l’utilisation de langes ou de peaux d’agneau (après avoir séché au soleil, l’urine et les selles deviennent poussière, explique le site).

Avant de penser que ces parents sont complètement fous, ce qui est tentant à première vue, il faut préciser qu’on peut pratiquer l’HNI tout en continuant à utiliser des couches en tissu (ce qu’a fait le fils d’Ulrika).«Parfois il faisait 20 pipis dans sa couche, parfois nous les rattrapions tous à temps», explique-t-elle.

A 18 mois, il était propre, comme la plupart des petits élevés ainsi. A 19 mois, il est allé à la crèche sans couche. Un peu déstabilisé au départ, il a fait pipi sur quelques assistantes maternelles, mais s’est vite adapté. Dans leur quartier verdoyant de Stockholm, faire pipi derrière les buissons n’a pas posé de problème.

Les fans de l’hygiène naturelle infantile rappellent que 50% des enfants dans le monde sont propres avant un an, alors que les petits occidentaux gardent leurs couches de plus en plus longtemps, entre deux ans et demi et trois ans en moyenne. Les couches modernes sont devenues tellement absorbantes que le bébé ne ressent plus trop qu’il est sale. Peu gêné par les couches pleines, il est moins motivé pour aller sur le pot. Une étude menée sur des petits garçons néerlandais montre qu’en 1996, ils faisaient en moyenne pipi dans le pot 6 mois et demi plus tard qu’en 1966.

Pendant ce temps, en Chine, le conflit culturel fait rage entre les familles qui jugent les pantalons fendus peu civilisés, et ceux qui plaignent les bébés qui baignent encore dans leur caca à 2 ans (et accusent leurs parents de laxisme). Les campagnes marketing de Pampers font tout pour que le débat soit tranché: la compagnie a récemment financé des études montrant que les bébés portant des couches jetables dormaient un peu mieux que les autres. En 2007, la campagne «Sommeil Doré» a permis d’augmenter considérablement les ventes... et l’Inde est maintenant dans la ligne de mire.

(Source: Slate.fr)

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